Atelier 1

Table d'index

Quelques poussières, ton regard de velours

Auteur: Valery Meynadier

Mon dos était en paix dans cette maison, il défiait les hauteurs tranquilles, ne me demandait rien, ne m‘avertissait de rien, simplement présent
Aujourd’hui, il se cache, en fuite, il a peur, noué comme tes mains
Sur la ligne sans évidence, j’allonge mes pas
Le passeur me demande d’ouvrir la bouche
Ton haleine sur l’... Lire tout

fermer

Quelques poussières, ton regard de velours

Auteur: Valery Meynadier


Mon dos était en paix dans cette maison, il défiait les hauteurs tranquilles, ne me demandait rien, ne m‘avertissait de rien, simplement présent
Aujourd’hui, il se cache, en fuite, il a peur, noué comme tes mains
Sur la ligne sans évidence, j’allonge mes pas
Le passeur me demande d’ouvrir la bouche
Ton haleine sur l’ivoire de mes dents
Il fallait que je revienne
Le ciel se referme comme l’eau de la barque derrière lui
Là-bas, il me faudra encore enlever le silence de ma bouche
Cela il ne le sait pas
Et le mettre dans une petite boîte
Tout ce que je ne peux pas te dire


Fermer Precedent Suivant

Bleu

Auteur: Lilian Bathelot

Quartier du port, Sète
Le café avait un goût de terre, le fin gobelet de plastique blanc brûlait les doigts.
Elle leva la tête, cherchant de l’air peut-être. Un carré de ciel laiteux se découpait sur l’obscurité, là-haut, par-delà les murs lépreux. Trois murs aveugles dont le crépi partait en plaques géographiques, le dernier percé... Lire tout

fermer

Bleu

Auteur: Lilian Bathelot


Quartier du port, Sète
Le café avait un goût de terre, le fin gobelet de plastique blanc brûlait les doigts.
Elle leva la tête, cherchant de l’air peut-être. Un carré de ciel laiteux se découpait sur l’obscurité, là-haut, par-delà les murs lépreux. Trois murs aveugles dont le crépi partait en plaques géographiques, le dernier percé de petites fenêtres sales en enfilade verticale: une cage d’escalier. Fanny hocha la tête.

Lire la suite


Fermer Precedent Suivant

Insurrection

Auteur: Joelle Wintrebert

Amis, vos yeux brillent comme des fenêtres ouvertes sur une nuit profonde et veloutée.
Vos noms et vos mots chantent et m’enchantent ;
Ils couvent des orages, ils m’emportent et je voudrais crier :
Que le ciel se déchaîne ! Qu’il tonne et se déchire et ruisselle !
Après la foudre, un monde renaîtra, que vous ferez vôt... Lire tout

fermer

Insurrection

Auteur: Joelle Wintrebert


Amis, vos yeux brillent comme des fenêtres ouvertes sur une nuit profonde et veloutée.
Vos noms et vos mots chantent et m’enchantent ;
Ils couvent des orages, ils m’emportent et je voudrais crier :
Que le ciel se déchaîne ! Qu’il tonne et se déchire et ruisselle !
Après la foudre, un monde renaîtra, que vous ferez vôtre ;
Vous le danserez au son brûlant des tambours.
Vous célèbrerez les jours bleus et les soirs incendiés, les plis obscurs des crépuscules.
Vous trouverez les semelles de vent du poète pour arpenter les chemins de silence où les vengeances perdent leur sens.
Un matin, lavé de pluie, transparent, vous vous tiendrez devant la mer ogresse, mais vous ne la craindrez pas.
La douce corolle de l’amitié cuirasse contre le danger.
Armées d’amour toutes vos heures deviendront rouges, et plus jamais une colère ne triomphera de vous.


Fermer Precedent Suivant

Merci pour vos mots de lumières

Auteur: Janine Teisson

Merci pour vos mots de lumière
De beauté et de déchirement.
Voici pour vous quelques poèmes en vrac.
Il y en a un peu trop sans doute.
Vous pouvez éliminer ceux qui ne vous parlent pas,
Ils ne diront rien.
Certains sont courts, d’autres longs,
Je vous les offre.
Je ne sais pas qui vous êtes... Lire tout

fermer

Merci pour vos mots de lumières

Auteur: Janine Teisson


Merci pour vos mots de lumière
De beauté et de déchirement.
Voici pour vous quelques poèmes en vrac.
Il y en a un peu trop sans doute.
Vous pouvez éliminer ceux qui ne vous parlent pas,
Ils ne diront rien.
Certains sont courts, d’autres longs,
Je vous les offre.
Je ne sais pas qui vous êtes.
Et nous avons beaucoup de choses à échanger.
Pour l’instant échangeons nos mots.
J’aimerais inventer pour vous le mot magique,
Celui qui précède et entraîne les mots liberté,
Tranquillité, droit, travail, respect, amitié.
C’est le dérisoire mot : « papiers » ?
C’est lui le mot magique ?
Je remercie tous ceux
Qui m’ont empêchée de parler.
Ils m’ont donné l’écriture.

Se défaire

Pelote de mon être
Enroulée serrée.
Si j’ouvre mes mains
Elle tombe,
Roule,
Se défait,
Redevient fil,
Qui commence
Et finit nulle part.

Haïkus

Je remercie tous ceux
Qui m’ont empêchée de parler.
Ils m’ont donné l’écriture.

J’abandonne
Au temps chacal
Des lambeaux de ma jeunesse.

Les kilomètres qui nous séparent
Sont de pierre
Aujourd’hui.

Il faut du temps
Pour traverser
L’étrangeté de l’autre

Plus que le connu
En toi
Ce que j’aime : l’insaisissable.

Les mots sont libres et gratuits
Sauf certains,
Prisonniers, qu’on paye toute sa vie.


Fermer Precedent Suivant

L'intérieur des bras

Auteur: Francoise Renaud

simple écho aux textes de Noujoud, Murelh, Mohamed, Identsi, Hassan, Gianna, Emma, Ali, Abdelhakim et les autres…

Celui qui m'a accompagné,
celle qui a pleuré et m'a fait ouvrir les yeux,
tous ceux et celles qui habitent ce pays ou un autre pays,
quelle que soit la durée de leur présence... Lire tout

fermer

L'intérieur des bras

Auteur: Francoise Renaud


simple écho aux textes de Noujoud, Murelh, Mohamed, Identsi, Hassan, Gianna, Emma, Ali, Abdelhakim et les autres…

Celui qui m'a accompagné,
celle qui a pleuré et m'a fait ouvrir les yeux,
tous ceux et celles qui habitent ce pays ou un autre pays,
quelle que soit la durée de leur présence auprès de nous, ils ont inscrit leurs noms en fines calligraphies dans notre mémoire de sable sous la lumière aveuglante du soleil, et ces noms ne s'effaceront jamais car ils sont l'écho de notre demande – et c'est une chose vraie pour tous les humains.

Vous avez parlé d'eux.

Du coup je les vois clairement, visage offert et mains ouvertes. Peut-être que je les rêve mais non, je vous assure que je les vois comme s'ils avaient été mes gens et avaient fait partie de ma tribu. L'intérieur de leurs bras paraît doux et moelleux, on a envie de s'y couler comme dans une eau, un abri calme. Ils s'ouvrent, se rapprochent, se referment et nous enveloppent une courte poignée d'instants dans un mouvement de danse. Pas de mots – pas besoin. Rien que la pression de la poitrine et la danse. Le chaos en dedans se désagrège avec la chaleur et l'odeur de la sueur, scènes silencieuses, personnelles – nul ne peut voir ce qui se passe dedans.

Le langage de ces corps est tout ce dont nous avons besoin.

Contact. Sentiment d'existence.

Amour.

C'est à eux qu'on repense chaque fois qu'on peine, privé d'affection, de liberté, traqué, maudit, harcelé.


Depuis notre naissance un voile s'est répandu sur le paysage autour de la maison : désert jungle ville bocage bord de mer collines boisées steppe haute montagne. Chaque aurore
qui vient éclaire un infime recoin de l'être. Le moment vient où on aperçoit le bord de la terre et l'enfant intérieur, tapi sous un bouquet d'arbres, qui réclame sa pitance d'amour.


Fermer Precedent Suivant

Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens

Auteur: Carole Menahem Lilin

J’ai été touchée par la force des textes publiés sur le blog, par les images qu’ils font naître, les souvenirs et émotions qu’ils donnent à partager – une beauté qui nait de l’exactitude et du vouloir dire. J’ai aimé qu’ils rendent hommage. Sans éluder la révolte, les difficultés, le questionnement.

Petite-fille d’immigrants venus... Lire tout

fermer

Si tu ne sais pas où tu vas, regarde d'où tu viens

Auteur: Carole Menahem Lilin


J’ai été touchée par la force des textes publiés sur le blog, par les images qu’ils font naître, les souvenirs et émotions qu’ils donnent à partager – une beauté qui nait de l’exactitude et du vouloir dire. J’ai aimé qu’ils rendent hommage. Sans éluder la révolte, les difficultés, le questionnement.

Petite-fille d’immigrants venus d’Europe centrale et de Méditerranée, fille de parents qui ont dû vivre cachés, sous un faux nom, durant l’Occupation, mais qui m’ont toujours dit être fiers d’être français, je me sens particulièrement interpellée par le trajet de ceux qui témoignent ici.

Combien parmi nous, qui nous disons de ce pays, n’en seraient pas – ou n’existeraient pas, tout simplement - si leurs ascendants avaient été déclarés irrecevables ? si leur appétit d’aventure, d’invention, de construction, de rencontres, avaient été bridés ? barrés ? repoussés aux frontières ?

Combien d’œuvres, de réussites, de bonheurs grands et petits, n’auraient pas vu le jour ?

Sait-on combien il faut de force pour arracher ses racines et les replanter ailleurs ? combien il faut de force pour cicatriser, sans devenir amer ? sait-on quelle force traduit le sourire si doux de l’immigrant ?

Mes amis ont souvent été fils et filles de ces aventuriers, quand ils n’étaient pas émigrés eux-mêmes. J’ai aimé partager avec eux ce sentiment de la complexité et de la relativité. Découvrir que le salé peut être sucré. Qu’il y a d’autres modes que les mineur et majeur, que nos oreilles peuvent percevoir des quarts de tons inconnus. Que tout un mot peut être contenu dans un seul signe, qu’on peut danser avec le ventre, trembler des épaules, s’incliner du cœur. Que les stéréotypes ne sont qu’une infime partie de l’être, et voyager dans les cultures un moyen de devenir encore plus soi.

Ce goût d’être et d’oser ensemble, et de construire toujours à nouveau – puisque de toute façon, rien n’est donné pour toujours, que même dans la nature, l’immobilité n’existe pas – je l’ai découvert très jeune, et j’en remercie mon époque.

Notre mode est faite en grande partie de rencontres, notre cuisine aussi. Nos lectures, nos musiques, notre cinéma… Le monde est d’ores et déjà métis, et multiculturel. Les épices sont déjà dans le pain, comme le dit Gianna. Laissons la cuisson se faire… donnons-lui une chance de nous surprendre, de nous régaler aussi.

J’ai le sentiment qu’en repoussant ces jeunes aux frontières, c’est notre part d’enfance, d’élan qu’on repousse. La part d’audace et de générosité. Comme si on ne croyait plus que le monde peut être bon, à défaut de meilleur.

Qui peut savoir d’où viendront la chance de demain, l’énergie de demain ? Certainement pas d’une société cloisonnée, où chacun devrait se justifier d’exister. Où les tiroirs, les mouroirs se referment.

Même durant l’Occupation, il y a eu des gens assez tendres et fous pour risquer leur vie en protégeant des enfants. Pour que la vie se survive.

Pour que la trans-mission, qui est souvent trans-frontière, se fasse.


Fermer Precedent Suivant

Si la terre était carrée

Auteur: Bruno Chevalier

Si la terre était carrée, d’abord, ce serait un cube.
Il y a aurait six vies, une pour chaque face, et douze horizons, un à chaque arêtes :
Et Dieu jouerait aux dés.
Chaque vie aurait quatre horizons plats
et quatre angles droits et Diable jouerait aux dés.
Les pôles passeraient par deux pointes opposées de la ... Lire tout

fermer

Si la terre était carrée

Auteur: Bruno Chevalier


Si la terre était carrée, d’abord, ce serait un cube.
Il y a aurait six vies, une pour chaque face, et douze horizons, un à chaque arêtes :
Et Dieu jouerait aux dés.
Chaque vie aurait quatre horizons plats
et quatre angles droits et Diable jouerait aux dés.
Les pôles passeraient par deux pointes opposées de la structure
et le soleil brillerait de ses six facettes.
Les poules auraient des dents et mangeraient les renards.
Les goupils seraient dociles et prévisibles. Euh...non, là je m'égare.
Dans ma vie, l’horizon s’étalerait monotone des falaises de Fécamp au bassin d’Arcachon.
Dans ma vie, il y a trois autre communauté, avec chacune son horizon.
Les autres horizons de ma vie me seraient inconnus.
Il serait interdit d’en parler.
Au bord de mon horizon, Galilée, notre astrophysicien aurait théorisé une autre vie. Einstein, Albert de son prénom, aurait inventé le pendule à passer l’horizon, par sustentation, dans l’autre vie.
Sans le pendule, tu tomberais dans le vide intersidéral.
Si la terre était carrée, par exemple, l’expression « arrondir les angles n’existerait pas et l’on se mettrait sur la tronche à longueur d’horizon, grâce à des pendules de guerre.
On inventerait des drones pour espionner les autres vies, mais aussi surtout les autres communautés. Mais, cela, je le répète, il serait interdit d’en discourir.
On leur balancerait des bombes atomiques sur des pendules faits exprès, des pendules qui ne pourraient pas revenir. Et pour cause, on aurait intérêt qu’à polluer les autres vies.
Donc, Dieu et Diable joueraient au quatre vingt et un avec Mars, Jupiter et la Terre.
Les trois planètes évolueraient dans le chaos du monde qui serait une piste de feutre vert bordée d’un pourtour vertigineux.
Les chocs seraient multiples, sans aucun rythme, aucun repos, aucune habitude non plus.
Les terriens n’auraient pas de désirs, ni de projections ou d’envies.
Les pensées seraient ballotées et il n’y aurait pas de vent dominant.
Dieu et Diable s’en donneraient à cœur joie.
Les lois des probabilités les rendraient égaux.
et les vies seraient chahutées pour l’éternité.
Le temps : il n’y en aurait pas. Pas plus que de saisons. Quand Dieu et Diable décideraient de boire un verre au bar et de poser les godets du jeu interplanétaire, les vies sur les faces cachées s’éteindraient, étouffées dans le noir, les vies face au soleil grilleraient de mille douleurs.
Je vous le dis. Si la terre était carrée, ce ne serait pas une sinécure.

En même temps, revenons à notre vie sphérique, ici et maintenant. Arrêtons les suppositions. Comment peut-on supporter qu’à l’heure actuelle, depuis des millénaires, Dieu et Diable continuent à jouer à la pétanque !


Fermer Precedent Suivant