Jeune gambien, Ba (le prénom a été modifié) est arrivé en France après un périple de plus de 2 ans. Il a subi l’exploitation humaine en Libye et a survécu à la traversée de la méditerranée sur un zodiac. Il reste pudique sur cette partie de sa vie, dont les souvenirs le rendent triste. Il y a perdu un ami qui était son compagnon de voyage.

Arrivé à Montpellier à l’âge de 17 ans, il a été pris en charge par le Département, en tant qu’orphelin mineur.

Il ne parlait pas bien le français mais s’est accroché pour apprendre la langue et aller à l’école

Finalement inscrit au lycée en CAP mécanique automobile, il se passionne pour ce métier qui lui ouvre de belles perspectives. Il est apprécié de ses professeurs et de ses maîtres de stages. Il est fier de savoir faire des vidanges et changer des plaquettes de frein.

Mais un matin, alors qu’il s’apprêtait pour aller en cours, la PAF (Police de l’Air et des Frontières) vient le chercher au levé du lit, lui passe les menottes et l’emmène au poste. Il y reste 24 heures en garde à vue, sans pouvoir contacter ses éducateurs. Dès le lendemain, il est présenté au tribunal et aussitôt jugé en comparution immédiate : il est condamné à “8 mois avec sursis”.

A la sortie du tribunal, l’avocat commis d’office, qui l’a assisté, lui dit qu’il est libre et qu’il peut repartir.

Ba n’a rien compris à ce qu’il lui arrivait. Il est soulagé de pouvoir rentrer chez lui. Sans se douter de la gravité des conséquences que cette condamnation va avoir pour lui.

Mais, à son retour, son éducateur lui annonce que, vu qu’il a été condamné, le Département ne veut plus le garder. Il doit partir. Il se retrouve ainsi à la rue, du jour au lendemain.

Il se réfugie dans un squatt et trouve la force de poursuivre ses études au lycée, sans rien dire à ses professeurs.

Jusqu’à ce que, quelques mois plus tard, la police débarque dans ce lieu-refuge pour évacuer les squatters. C’est à peine s’il a le temps de regrouper ses maigres bagages, sans oublier son sac de classe. Il est complètement démuni, il vient demander de l’aide à RESF.

Il est alors hébergé par une bénévole et il reprend courageusement ses études, avec le soutien de l’assistante sociale du lycée, seule mise au courant de sa situation.

Deux ans plus tard, il a obtenu son CAP et il est en bac pro mécanique automobile. Des entreprises seraient prêtes à l’embaucher. Mais sa situation administrative n’est toujours pas réglée. Impossible d’obtenir un Titre de séjour pour pouvoir travailler.

Les quelques heures passées au Commissariat puis au Tribunal ont suffit à faire tout basculer et stopper sa trajectoire d’intégration.

Sa condamnation, prononcée dans on ne sait quelle urgence, reste comme une tâche indélébile qui bloque maintenant toute tentative de régularisation.

Ba a été accusé d’avoir escroqué le Département. Son acte de naissance a été mis en doute. il aurait ainsi menti sur son âge. Son acte de naissance a pourtant été envoyé directement de Gambie au Département. et c’est le Département qui l’a remis à la PAF. Ba ne l’a jamais eu en mains.

Mais le Tribunal a condamné Ba . Il l’a fait sans lui donner réellement la possibilité de s’expliquer, ni de se défendre. Son avocat commis d’office ne connaissait rien à sa situation, ne connaissait rien en droit des étrangers. Et, comble, il n’a pas fait appel de la décision rendue, c’est à dire que même avec des éléments nouveaux prouvant son innocence, Ba ne peut pas revenir sur le jugement. Et pourtant il est en mesure de présenter des documents qui aujourd’hui prouvent sa bonne foi.

La seule solution aujourd’hui est de faire un recours à la Cour de Cassation à Paris, de demander une révision de procès…comme on l’a fait à l’époque pour innocenter le capitaine Dreyfus…Une procédure très lourde, alors qu’il aurait été si simple…